Dès la fin de mon activité, nous avions émigré, ma femme et moi, dans un village de 350 habitants, situé entre Dijon et Besançon. Et Benoit, l'ainé de mes petits-fils, qui devait avoir 8 ans était venu nous rejoindre au cours du premier été à la campagne.
C'est en sillonnant les environs, au cours de la visite d'un musée exotique, je ne sais plus lequel, que j'ai acquis un boomerang qui me paraissait de bonne facture.
Dès le lendemain, après une lecture attentive de la notice d'utilisation, j'ai voulu, accompagné de Benoit, m'adonner à l'art du lancer de boomerang.
J'estimai être aussi apte que les natifs d'Australie pour acquérir les rudiments de cet exercice, sans difficultés.
Le terrain de foot communal me parut idéal pour pratiquer ce sport. Alors dans la fièvre de la réussite, 20 fois j'ai lancé cette sorte d'équerre, 20 fois elle est retombée 50 mètres plus loin. C'est Benoit qui courait la ramasser, c'est infatigable à cet âge là.
Quelque fois l'engin débordait le cadre du terrain et s'enfonçait dans les taillis. C'est Benoit qui plongeait dans les fourrés pour le chercher. Il trouvait toujours c'est futé à cet âge là.
Il s'essayait de temps en temps au lancer lui aussi. Mais les résultats étaient encore plus décevants que les miens. C'est maladroit à cet âge là.
Enfin quand une dernière fois je propulsais, sans conviction, ce fichu boomerang, et que je le vis décrire une courbe élégante, et revenir vers moi, accompagné d'un léger vrombissement, j'ai été ébahi. C'est mon instinct de conservation qui m'a fait baisser la tête, une fraction de seconde avant l'impact fatal.
Je n'ai pas tenté de renouvelé ce succès. Dans l'incertitude j'ai préféré rester sur une bonne impression de réussite. D'autant que mon épaule droite me faisait souffrir.
En rentrant à la maison, la grand-mère eut droit aux commentaires du petit-fils, et moi à une observation:
- « Tu ne devrais pas jouer avec ce truc-là ce n'est plus de ton âge et vous pourriez vous faire mal »
Ce truc-là, c'est l'arme de chasse des aborigènes d'Australie. C'est dangereux, mais à présent j'en possède la maîtrise....
Depuis il est accroché sur un mur de ma chambre, mêlé à d'autres souvenirs, en mémoire de mon exploit.
A bientôt.
Georges